Bouh !
Je suis née dans une famille modeste, j’ai grandi dans les champs à répéter les mêmes gestes.
Mon histoire aurait pu commencer comme ça…
Mais pour ma part, je suis née. J’ai grandi dans une famille nombreuse avec mon papa et ma grand-mère.
Mon papa on l’appelait Pap’s, c’était un iop. C’est lui qui nous a appris à survivre dans la forêt quand on ne retrouvait plus la cabane. C’est aussi lui qui nous a appris à nous battre. Il voulait qu’on puisse se défendre entre nous, pas nous battre contre nous. Pendant les sessions d’entrainement, il nous disait souvent :
« Un iop doit savoir se servir de sa tête…. Mais vous n’êtes pas des iops, vous devez trouver votre propre voie. »
En général, les entrainements consistaient à aller dans un coin reculé de la forêt, assez éloigné de notre cabane, et de tout détruire… la seule condition était de venir sans armes, sans protections, sans médicaments, sans rien qui puisse nous servir ou nous aider.
J’aimais bien ces entrainements… on s’amusait et on rigolait.
Skelyta, ma grande sœur, est une sram… elle a vite appris à perfectionner sa passion : l’étripage d’animaux… c’était pas joli à voir mais c’était autorisé.
Skelaju, notre grand frère, se disputait souvent avec elle. On comprend pourquoi… lui passait du temps à dresser un moogron et elle venait le tuer.
Rien que d’y repenser, j’ai l’impression d’y être… le soleil qui tape sur la peau, le cœur qui bat la chamade… les os qui craquent, la douleur dans mes poings. Je revois encore Gonpachiro et Glehr qui courent partout pour nous soigner et nous cracher dessus derrière leurs masques de fortune. Je sens le vent dans mes cheveux juste après la déflagration que Nitro-Skel a provoquée avec ses expériences.
J’entends les rochers qui se brisent sous les poings de Pap’s. Les perles de sueur qui voltigent autour de lui, ces coups rapides et précis. On aurait dit un héros comme dans les contes de Mimoune. Il réduisait des montagnes en rochers et les rochers en poussière.
*grougrougrou*
Mon ventre gargouille, c’est bientôt l’heure. Pap’s disparait quelques minutes et revient avec un troupeau de moogr sur les épaules. On s’installe autour d’une flamme qu’il avait allumé dans le cadavre d’un craqueboule. Nitro-Skel veut faire griller la viande et Skelyta voulait la découper en morceau. Le seul qui s’éloignait du groupe, c’était Skelaju, il ne mangeait pas de viande, il dit qu’il ne peut pas trahir ses amis. Alors il va chercher des fruits avec Pap’s.
A la fin de la journée, tout le monde rentre. Tous sauf Pap’s.
Devant la cabane, Mimoune nous attend avec Michel, son phorreur. Elle récupérait toutes les armes et tous les remèdes qu’on avait fabriqué pendant l’entrainement.
C’était des jours heureux dans une famille heureuse. J’étais comblée et je ne pouvais rien demander de plus. On s’amuser tous les jours. Tous les jours, sauf celui-là. Cet évènement restera gravé dans ma mémoire à tout jamais.
J’ai à peu près 6 ans. Nous sommes trois à la maison. Mimoune est partie chasser, presque tout le monde suit l’entrainement spécial avec Pap’s. Skelaju et Skelyta sont restés avec moi. Je me suis cassée la jambe, je dois me reposer.
Ça pour me reposer, je me suis reposée ! Avec les cris de mes ainées, je n’ai même pas pu fermer l’œil. Je suis sûre que même Pap’s pouvait les entendre.
_ Arrêtez ! Ne vous disputer pas comme ça !
_ Toi, tu retournes te coucher, répond Skelyta. Si tu restes là, tu vas voir ton grand frère mourir.
_ Si tu penses y arriver, vas-y ! C’est moi l’ainé, c’est moi le plus puissant…
_ Ne vous battez pas ! Si Pap’s l’apprend, il va se…
_ Pap’s n’a rien à voir là-dedans… il est même pas notre vrai père.
_ Skelyta ! Tais-toi ! s’emporte Skelaju
_ Quoi ? Tu ne le savais pas ? Tu n’as pas remarqué qu’aucun de nous ne lui ressemble ? Et quand il est venu un beau jour avec ce truc et nous a dit que c’était notre sœur ?
_ Pour la dernière fois, arrêtes ! Ou je vais me fâcher !
Ma vue se trouble et mes oreilles bourdonnent… Je relève la tête et vois leurs yeux briller d’un rouge éclatant. Skelaju se tord subitement de douleur, moi je fus propulsée contre le mur.
A mon réveil, ce sont des masques froids et inexpressifs que je rencontre. Nitro-Skel dormait épuisée par son entraînement. Et une flaque de sang séché là où se trouvaient mes ainés.
Les jours suivant, on reprenait la routine, comme si de rien n’était. La blessure que j’avais gagné à la poitrine me faisait mal… mais j’endurais.
Je suis une sacrieur. Endurer, c’est ma voie !
Quand vint Nowel, je me sentais apaisée. Après tout, on a toujours fêté Nowel.
Pap’s qui venait avec un sequoiu plus grand qu’un Craqueler ancestral, mimoune qui nous offrait un pain qu’elle avait acheté avec l’argent de ce qu’on avait fabriqué pendant les entrainements. On décorait la cabane avec mes frères et sœurs.
J’étais persuadée qu’elle reviendrait, mais ce jour-là, pas de bonne odeur de pain de mie. Pas de sequoiu. Pas de décorations.
_ Mimoune ? Pourquoi il n’y a rien aujourd’hui ? C’est Nowel !
_ Tu sais, vous êtes grands maintenant. Nowel c’est pour les enfants.
_ Et le pain ? Et le sequoiu ? C’est parce qu’ils ne sont plus là ?
Elle a posé sa main tremblante sur mes cheveux, et elle m’a fixé… sans rien dire.
J’imagine que c’est au huitième Nowel qu’on devient grand.
Ce soir, je n’ai pas fermé l’œil, ma cicatrice me fait de plus en plus mal.
Les jours passent, pas la douleur. Si c’est ça être grand, autant ne pas grandir. Les entrainements quotidiens me fatiguent. Les mots de mes ainés raisonnent dans mon esprit.
La suiteeeeeeeee !!!!!!!!!!!!!!!!!!!